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KAPIARIC ET LE MONDE
12 mai 2018

Les trois plaies de la congolaise

Mercredi 11 avril. Il est 9 heures, au rond-point Pompage dans la commune de Ngaliema. Plusieurs passants hurlent sur une femme, assise sur une moto (mototaxi) et dont certaines de ses parties postérieures sont à l’air libre. C’est un « scandale » sur ce carrefour populeux à ces heures de pointe. Et la scène a valu des selfies et des vidéos partagées tout de suite sur les réseaux.

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« Nous ne savons pas ce que ces femmes cherchent », se demande un homme qui se dit choqué par « le non-respect du corps sacré de la femme ». Son voisin rétorque en affirmant que « de telles femmes sont nombreuses à travers la ville ». « Les femmes qui tiennent à leur dignité sont rares. La tendance aujourd’hui est à l’exposition du corps », accentue-t-il.

Cette scène donne de la matière à analyser. Même si le combat des femmes pour la reconnaissance de leurs droits est à encourager, quelques situations les dévaluent. Plusieurs situations – la perte de la féminité au nom de l’émancipation de la femme, l’amour de l’argent des femmes les faisant souvent objet sexuel et la dot quand elle est mal gérée – font déprécier la gent féminine.

Les femmes se renient

Indira Gandhi, femme d’Etat indienne, l’a déjà soulevé dans ses analyses. « Pour être libérée, la femme doit se sentir libre d’être elle-même, non en rivalité avec l’homme mais dans le contexte de sa propre capacité et de sa personnalité », conseillait-elle. Même son de cloche du côté de Jean-Marc Reiser qui soutient que « les femmes qui veulent être les égales des hommes manquent sérieusement d'ambition ».

Les femmes congolaises perdent, à ce point de vue, de plus en plus les valeurs féminines. « Les femmes d’aujourd’hui ne sont plus encore tendres, douces, pacifiques. Toutes veulent être ce qu’elles ne sont pas », déplore Cathy, rencontrée dans la scène du rond-point Pompage.  

Plusieurs observateurs de cette scène ont estimé que les Congolaises perdent de plus en plus leur féminité. « Elles vivent dans une autre peau. C’est une forme de reniement auquel elles font face inconsciemment », soutient le psychologue Antoine lors du fameux débat de Pompage. Tout donne à croire que la gent féminine vit dans une forme « d’apatridie sexuelle ».

Elles ne sont ni femme ni homme. Un grand danger pour elles, car sans identité à protéger, elles deviennent comme de l’herbe emportée par tout coup de vent. Les femmes devraient rester elles-mêmes malgré ce grand combat de la parité qu’elles mènent.

La prostitution dévalorise

Un penseur Shannon Bell définit la prostitution comme une forme quelconque d’interaction sexuelle en échange d’une forme quelconque de paiement. Même s’il s’agit d’une interaction sexuelle, la contrepartie gâche tout. L’argent qui intervient ferait des femmes, et c’est ce qui arrive très souvent, des objets que les hommes se procureraient sur le marché du sexe.

Dans cette optique, la prostitution dévalorise la femme. « On ne peut pas vendre sa sexualité, son intimité, son âme, sa sensibilité, sa dignité, sa féminité, son odeur, sans en subir de conséquences », affirme Chloé, 35 ans, dans l’article « Moi, ex-prostituée, je dis non à la prostitution », sur le site web de la l’organisation québécoise Concertation des Luttes contre l’Exploitation Sexuelle (CLES).

Cette ancienne professionnelle du sexe regrette le fait qu’elle repousse son humanisme au moment de l’acte sexuel. « Lorsque mon client remonte ses culottes, je n’ai rien oublié. Et c’est lui qui a le beau rôle car, une fois ses culottes remontées, il reprend sa vie là où il l’a laissée une heure plus tôt. C’est-à-dire qu’il redevient un père, un « honnête citoyen », un bon travailleur ou un patron super, un mari « aimant », un homme respecté par sa famille et ses amis… Moi, je reste la pute… », explique-t-elle.

L’échange économico-sexuel dégrade les femmes. Avec son ami - amour de l’argent-, il a tout pour chosifier la gent féminine auprès des hommes qui sont servis sexuellement en contrepartie de leur argent. Faut-il lutter contre ce métier pour honorer plus la femme ? La question ouvre un autre débat.

La dot fait-elle de la femme une marchandise ?

« La dot en RDC : est-ce une nouvelle forme de commerce ? », «  La dot : un geste ou un commerce ? ». Ces deux titres, coiffant les articles dans la presse kinoise, ont abordé une question sociale à l’origine de la dévalorisation de la femme par certains hommes. La dot, une des contraintes du mariage entre un homme et une femme, est en train de virer de plus en plus vers tout un commerce. Ici, il y a échange entre l’argent masculin contre la fiancée.

Pour la prendre, la famille de l’homme ou le fiancé lui-même devrait débourser beaucoup d’argent. De ce point de vue, la jeune fille qu’on donne en mariage est victime d’une vente qui ne dit pas son nom. Le comble est que plusieurs familles s’accrochent à cette pratique au point que pour se marier à Kinshasa, les jeunes hommes doivent remplir leurs poches.

N’est-ce pas une autre forme de dévalorisation de la femme ? Les associations féminines, si elles tiennent au respect de la femme, sont interpellées à ce sujet. Pour plus de respect envers la femme, le combat devrait être mené contre ces trois situations au dénominateur commun : dévalorisation de la femme.

Ricky KAPIAMBA

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  • Ce blog propose des analyses sur différents sujets d'actualité tant congolaise qu'internationale. Il se propose également de réfléchir scientifiquement sur les phénomènes sociaux en vogue.
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